Dans la sphère bancaire, le compte joint est communément adopté par les couples mariés ou pacseés. Toutefois, dans certaines situations particulières, comme un divorce, l’un des époux peut souhaiter clôturer ce compte sans l’approbation de l’autre. La question se pose alors : est-ce juridiquement faisable ? En se basant sur le code civil, la doctrine juridique, et la jurisprudence de la Cour de cassation, nous tenterons de répondre à cette interrogation.
Le compte joint sous le prisme du Code civil
Le Code civil ne mentionne pas spécifiquement le compte joint. Néanmoins, il établit des principes fondamentaux qui régissent les relations contractuelles, dont celles liées aux comptes bancaires. De ce point de vue, le compte joint peut être perçu comme un contrat d’adhésion entre l’établissement de crédit et les co-titulaires du compte.
D’après l’article 1134 du Code civil, « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. » Cela signifie que le contrat liant les titulaires du compte à l’établissement bancaire doit être respecté par toutes les parties. Toutefois, d’autres articles du Code Civil, comme l’article 1184, prévoient la possibilité de résilier unilatéralement un contrat en cas de manquement grave d’une des parties à ses obligations.
La question est alors de savoir si la volonté unilatérale de l’un des époux de résilier le compte joint peut être considérée comme un manquement grave aux obligations contractuelles.
La jurisprudence de la Cour de cassation face à la résiliation unilatérale
La Cour de cassation, en tant que plus haute juridiction de l’ordre judiciaire français, a eu à se prononcer sur la question de la résiliation unilatérale d’un compte joint. Sa position est assez claire : la résiliation unilatérale du compte joint n’est pas possible sans l’accord de l’autre conjoint.
Dans un arrêt du 18 mai 2017, la Cour de cassation a ainsi rappelé que « l’ouverture d’un compte joint crée une indivision entre les cotitulaires, dont aucun ne peut demander le partage tant que dure le contrat ». En conséquence, l’un des époux ne saurait, sans l’accord de l’autre, demander la clôture du compte joint.
Le rôle prépondérant des établissements bancaires dans la gestion du compte joint
Pour éviter les litiges, les établissements bancaires jouent un rôle clé dans la gestion des comptes joints. En effet, lors de l’ouverture d’un compte joint, la banque établit un contrat précisant les droits et obligations de chaque titulaire du compte. Ce contrat, souvent présenté sous la forme d’une convention de compte, inclut généralement une clause spécifique relative à la clôture du compte.
Certains établissements bancaires prévoient dans leur contrat une possibilité de clôture unilatérale du compte. Toutefois, cette clause est souvent assortie de conditions strictes et ne peut être appliquée que dans des cas précis, tels que l’existence d’un litige entre les co-titulaires du compte ou la mise en place d’une procédure de divorce.
En conclusion, la résiliation unilatérale d’un compte joint sans l’aval du conjoint est une affaire complexe qui dépend essentiellement de la convention de compte établie par l’établissement bancaire au moment de l’ouverture du compte. La jurisprudence et le code civil s’accordent généralement pour considérer que le compte joint crée une indivision entre les co-titulaires, empêchant ainsi sa clôture unilatérale sans l’accord de l’autre partie.
Il est donc vivement recommandé, avant d’ouvrir un compte joint, de bien se renseigner sur les conditions de clôture prévues par votre établissement bancaire. En cas de litige, n’hésitez pas à consulter un professionnel du droit pour vous aider à faire valoir vos droits. Dans tous les cas, le dialogue demeure la meilleure solution pour gérer sereinement les questions d’ordre financier au sein du couple.